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Discours

se disposait à retourner à Venise, lorsqu’un événement aussi imprévu que glorieux pour lui et pour les lettres, le fixa à jamais en France.

Comme l’étude de la langue italienne entrait dans le plan d’éducation des Dames de France, et que personne n’en pouvait donner de meilleures leçons que Goldoni, on saisit avec empressement cette circonstance pour l’arrêter en France ; et bientôt il fut appelé à la cour. Voilà donc notre illustre auteur portant sa bonhomie, ses goûts simples et purs, toutes ses vertus enfin, dans un séjour et dans une société auguste, où tout cela était à sa place naturelle : aussi y fut-il constamment le même, et il était impossible qu’il y changeât. Qu’ils l’ont peu connue ou mal jugée, cette Cour si calomniée, ceux qui, humiliés, on ne sait pourquoi, de son éclat extérieur, ne lui ont pas même voulu supposer des vertus qui les eussent humiliés davantage et avec bien plus de raison. Soyons justes avec ceux qui ne l’ont été pour personne, et demandons-leur ce que font les noms, quand les choses restent les mêmes ; et pourquoi ce qu’ils admireraient dans un simple particulier, cesse de les toucher dans un Prince ou dans un Monarque ? Serait-ce par cela seul qu’il est Prince ou Monarque ? Conçoit-on une pareille logique, et revient-on de son étonnement, quand on se rappelle qu’elle a été en effet celle de bien des gens ? Ah ! puisque le vice sur le trône n’a pu ni ne doit échapper dans aucun temps à l’inflexible jugement de la postérité, pourquoi se refuser à la satisfaction de recueillir les exemples vertueux qui ont illustré la pourpre des Rois ? La calomnie aura-t-elle