Page:Goldoni - Les chefs d'oeuvres dramatiques, trad du Rivier, Tome I, 1801.djvu/24

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Préliminaire.

veillance qu’il reçut successivement de cette même Adélaïde ; de cette Mme Clotilde, dont la bonté était devenue le nom, comme elle en était le caractère ; de cette malheureuse Élisabeth ; qui depuis… ! Ô temps ! ô souvenirs d’éternel effroi ! ô sujets amers de pleurs intarissables ! En fouillant dans les annales sanglantes des jours qui la virent périr, nous ne trouvons pas même, au sujet de cette bonne Princesse, ces prétextes imaginaires qui créaient alors de prétendus coupables, pour en faire bientôt des victimes. Que lui reprochaient-ils donc, que voulaient-ils punir en elle ?… Ô ! qui que vous soyez qui avez vu passer ces jours affreux, méritiez-vous d’y survivre, si vous m’en demandez davantage ? Il n’est pas loin, le temps où tant de forfaits seront peints de leurs couleurs, et exposés dans leur hideuse nudité. Il faudra bien surmonter l’horreur qu’ils inspirent, pour en dévoiler les causes : il faudra bien tout dire… et l’on dira tout[1].

Avec un emploi aussi honorable et de semblables Protectrices, Goldoni pouvait faire, en France, une fortune brillante sous tous les rapports : il ne le fit pas, parce que, comme il le dit lui-même en vingt endroits de ses Mémoires ; je vivais à la cour, et n’étais point Courtisan. On peut croire que s’il ne sut ou ne voulut jamais être Courtisan, même à la cour, il fut bien moins encore l’esclave de ces petits Cercles, où l’on veut absolument avoir un homme

  1. Dans un ouvrage intitulé : des Guerres d’opinions, que l’auteur de cette traduction médite et prépare depuis long-temps, et qui paraîtra sous quelques mois.