Page:Goldoni - Les chefs d'oeuvres dramatiques, trad du Rivier, Tome I, 1801.djvu/26

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xxiii
Préliminaire.

connu, et laissant une mémoire chère aux lettres et respectable à tous les gens de bien.

Il est plus d’un écrivain, dont l’éloge est fini ; quand on a parlé de son génie et vanté ses productions. Cet accord si précieux et si désirable du génie et de la vertu, des mœurs et des talens, devient nécessairement plus rare, à proportion que les uns et les autres dégénèrent davantage. Ils semblent se finir, à mesure qu’ils se trouvent moins dignes les uns des autres : isolés alors, et privés de leur mutuel appui, leur décadence devient plus sensible de jour en jour, et leur réunion plus désespérée. Les Anciens, nos modèles en vertus, comme ils furent nos précepteurs dans tous les arts ; les Anciens, pour qui bien faire était plus encore que bien dire, ne concevaient de véritablement grand en tout genre, que ce qui était éminemment vertueux. L’on peut voir dans les admirables Institutions de Quintilien, que s’il s’occupe de former avec soin et d’orner l’esprit de son jeune élève, il met bien plus d’attention encore et de sollicitude à ouvrir son ame à toutes les vertus ; persuadé avec raison, qu’il en fera aisément un orateur habile, quand il en aura fait un citoyen vertueux. Parcourez tout ce que Cicéron a écrit sur l’éloquence, et par-tout vous le verrez poser la probité pour base de ce bel art. Et ce qui donne au sentiment de ces grands hommes une autorité plus respectable encore, c’est que les détails de leur vie ne furent jamais en contradiction avec leurs discours : c’est qu’ils ne conseillaient rien, qu’ils n’eussent d’avance pratiqué