Aller au contenu

Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/168

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

et des divertissements champêtres. La Reine, en robe de percale blanche, en fichu de gaze, en chapeau de paille, courait les jardins, allait de sa ferme à sa laiterie, menait son monde boire son lait et manger ses œufs frais, entraînait le Roi, du bosquet où il lisait, à un goûter sur l’herbe, tantôt regardait traire les vaches, tantôt péchait dans le lac, ou bien, assise sur le gazon, se reposait de la broderie et du filet en épuisant une quenouille de villageoise[1]. Ces jeux faisaient le bonheur de Marie-Antoinette. Que d’enchantement pour elle, que d’illusion dans ce rôle de bergère et dans ce badinage de la vie des champs ! Le joli royaume de cette Reine qui pleurait à Nina, et ne voulait autour d’elle « que des fleurs, des paysages et des Watteau »[2] ! Quelle aimable patrie de son âme et de ses goûts, Trianon ! ce Trianon où son ombre erre encore aujourd’hui ; où, malgré l’ingratitude des choses, le silence de l’écho, l’oubli de la nature, tout parle

    la vie presque bourgeoise de la reine à Trianon en mai 1779 : «… La Reine commença par y prendre le lait d’ânesse et y observa le régime le plus strict ; S. M. ne s’y promenait qu’aux heures du jour les plus propres à faire de l’exercice et elle était retirée régulièrement à onze heures du soir. Quoiqu’il n’y eût pas d’étiquette dans la tenue de la cour, les différents temps de la journée s’y arrangeaient avec l’ordre convenable ; tous les alentours se rassemblaient à un déjeuner qui tenait lieu de dîner ; différents jeux, une conversation générale, un peu de promenade remplissaient une partie de l’après-midi et conduisaient au temps de la soirée et du souper, qui avait toujours lieu de bonne heure.

  1. Mémoires de Mme Campon.
  2. Mémoires secrets et universels des malheurs et de la mort de la Reine de France, par Lafont d’Ausonne.