Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/22

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reille destruction[1], » ce ministre, M. de Choiseul, obéissait à la nécessité et à la raison des choses en entrant à fond dans la politique de M. Bernis, en allant jusqu’au bout de ses conséquences, et en acquérant à la maison de Bourbon l’alliance de son ancienne ennemie, la maison d’Autriche. Les périls du moment, aussi bien que les craintes de l’avenir, l’évolution des puissances de l’Europe, le déplacement des contre-poids de son équilibre, la tyrannie de ses conseils usurpée par l’Angleterre, l’amoindrissement de l’Empire, faisaient une loi à M. de Choiseul de rompre avec une politique qui n’était plus qu’un préjugé, et de former contre l’Angleterre ce qu’il appelait « une alliance du Midi, » c’est-à-dire de la France, de l’Espagne et de l’Autriche[2]. Mais cette alliance, ou plutôt cette ligue, dont M. de Choiseul espérait la restauration du rang et de l’honneur de la France, M. de Choiseul ne la jugeait pas suffisamment scellée par des traités. Il la désirait sans réserve, intime, familière. Aux liens d’un contrat de peuple à peuple il voulait joindre les nœuds du sang, de cour à cour. Flatter l’orgueil de mère de Marie-Thérèse, appeler une archiduchesse autrichienne à l’espérance et à la succession du trône de France, unir dans un mariage les futurs intérêts des deux monarchies, lui parut le sûr moyen de faire la réconciliation effective et le

  1. Lettre du duc de Choiseul. Catalogue de lettres autographes du 29 novembre 1857.
  2. Mémoires de M. le duc de Choiseul, imprimés dans son cabinet à Chanteloup en 1778. Paris, 1790.