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Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/24

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donnait point son éducation aux soins des grandes maîtresses, ni ses talents à leurs indulgences : elle surveillait et guidait ses leçons, descendant jusqu’à s’occuper de l’écriture de sa fille, et la complimentant de ses progrès[1]. Elle cherchait bientôt tous les maîtres capables de donner à ses grâces les grâces françaises. Deux comédiens français, Aufresne et Sainville, étaient chargés par elle de faire oublier Métastase à l’archiduchesse, et son goût déjà vif de la langue et du chant italiens. Ils devaient la former à toutes les délicatesses de la prononciation, de la déclamation et du chant français. Marie-Thérèse entourait sa fille de tout ce qui pouvait lui parler de la France et lui apporter l’air de Versailles, des livres de Paris à ses modes, d’un coiffeur français à un instituteur français, l’abbé de Vermond[2]. Sa préoccupation constante était de montrer aux Français sa beauté et son esprit naissants, d’en envoyer le bruit à l’Œil-de-Bœuf, d’en occuper la curiosité désœuvrée de Louis XV. Et lorsque l’ambition de l’impératrice sera comblée, tels seront ses soins pour donner à la France une Dauphine digne d’elle, qu’elle fera coucher sa fille dans sa chambre, les deux mois qui précéderont son mariage. Profitant du secret et de l’intimité des nuits, elle s’empare des veilles et des réveils de Marie-Antoinette pour lui donner ces derniers conseils et ces dernières leçons qui feront de l’archiduchesse autrichienne cette princesse

  1. Lettre de Marie-Thérèse. Pièce de l’Isographie.
  2. Mémoires de Mme Campan, vol. I. — Mémoires de Weber concernant Marie-Antoinette. Paris, 1822, vol. I.