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Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/377

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Constitution a été violée aux yeux de la nation tout entière, demande que les auteurs et fauteurs d’un pareil crime soient recherchés et punis, et, sortant de l’Assemblée, sollicite une entrevue de la Reine[1].

La Révolution, le malheur, une expérience des hommes et des choses chèrement achetées, avaient fini par commander à la Reine la prudence, la défiance même. En repassant sa vie, l’histoire de ses dernières années, Marie-Antoinette avait appris à redouter les piéges et les trahisons. Puis, si Marie-Antoinette, renonçant à ses antipathies, oubliant de misérables griefs dans de telles catastrophes, pardonnait sans efforts à ses ennemis personnels, elle ne surmontait que difficilement ses préventions contre les hommes qu’elle jugeait avoir trahi la royauté. Elle doutait de ces remords qui venaient si tard, et l’heure lui semblait passée où le salut du trône pouvait être encore à la disposition des révolutionnaires arrêtant la Révolution au point où s’arrêtaient leurs ambitions, leurs vœux, leurs idées, leurs consciences. Pouvait-elle voir le dévouement dans ces services offerts sous condition à la royauté, dans ce retour des hommes de 1789, de 1790, de 1791, dépassés par les circonstances, et se rapprochant du Roi bien moins pour le sauver que pour sauver leurs systèmes ? Un seul l’avait touché ; c’avait été Barnave. Mais Barnave s’était donné, son dévouement

  1. Mémoires secrets et universels sur les malheurs et la mort de la Reine de France, par Lafont d’Ausonne.