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Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/378

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avait été gratuit ; et ce n’avait point été le triomphe de ses principes qu’il avait cherché dans le sacrifice de sa personne.

Avant M. de la Fayette, le général Dumouriez, effrayé de cette Révolution tombée « jusqu’à la canaille des désorganisateurs, » avait demandé une entrevue à la Reine ; et la Reine l’avait laissé se traîner à ses pieds. C’est en vain que, baisant le bas de sa robe, humilié, prosterné devant la Reine, il l’avait suppliée de se laisser sauver[1] : Marie-Antoinette avait refusé de se confier au général de la Révolution. Mais contre M. de la Fayette, quelles répugnances plus grandes encore chez la Reine ! C’était le volontaire d’Amérique, oublieux des applaudissements qu’elle avait donnés à son courage ; c’était l’ancien noble, tourné contre la monarchie ; c’était cet homme, aux ordres de sa popularité, toujours présent aux plus mauvais jours de la vie de la Reine, la Fayette qui dormait au 6 octobre ! la Fayette, ce complice de l’arrestation de Varennes, qui avait consenti à se faire le geôlier de la Reine ! la Fayette, que la Reine avait toujours rencontré, et qui avait partout poursuivi la Reine, à Versailles, à Paris, dans ses malheurs, dans sa vie, dans sa chambre !… Marie-Antoinette avait dit « qu’il valait mieux périr que de devoir son salut à l’homme qui leur avait fait le plus de mal, » et elle se refusait à être sauvée par M. de la Fayette[2].

Alors les choses se précipitaient. L’insulte autour

  1. Mémoires de Mme Campan, vol. II.
  2. Ibid.