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Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/456

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daction de son Mémoire. » Héron avait inventé ses calomnies : il n’avait pas une pièce, et le Comité était obligé de renoncer au Mémoire de Héron et Marat, de chercher ailleurs, et d’attendre encore, malgré les clameurs et les colères enragées qui gourmandaient ses lenteurs : « L’on cherche midi à quatorze heures pour juger la tigresse d’Autriche, et l’on demande des pièces pour la condamner, tandis que si on rendait justice, elle devrait être hachée comme chair à pâté[1]

Tandis que tous ces hommes travaillaient à sa mort, la Reine respirait un moment, et il y avait autour d’elle comme un adoucissement des cœurs et des choses. Elle était entourée de soins, de prévenances, d’attentions, par le citoyen et la citoyenne Richard, braves gens qui ôtaient tout ce qu’ils pouvaient d’inhumain et d’atroce aux consignes de Fouquier. Par eux, la Reine avait un bon lit ; ils apportaient à son petit appétit des mets qui ne lui répugnaient pas ; ils essayaient de lui faire des surprises et de petits plaisirs, courant les marchés, les halles, la Vallée, pour lui trouver un mets, un fruit, un rien qu’elle aimât ; avouant parfois, pour être mieux servis, pour qui ils achetaient, et trouvant des marchandes comme cette marchande de la halle qui, là-dessus, renverse toute sa boutique, choisit son plus beau melon et le donne à Richard pour sa prisonnière[2]. Les gendarmes

  1. Le père Duchêne, n° 296.
  2. Récit exact, par la dame Bault.