Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/47

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miner la porcelaine susdite et de la manier. Cela paraissait inquiéter le comte de Provence, et, au moment où madame la Dauphine le plaisantait sur cette crainte, M. le Dauphin, qui tenait entre ses mains la pièce de porcelaine en question, la laissa tomber, et elle se brisa en morceaux. M. le comte de Provence, dans son premier mouvement de colère, s’avança sur M. le Dauphin ; ils se colletèrent et se donnèrent quelques coups de poing. Madame la Dauphine, très-embarrassée de cette scène, eut la présence d’esprit de séparer les combattants, et elle reçut même à cette occasion une égratignure à la main[1]. »

Tentons de peindre la famille dans laquelle est entrée la jeune archiduchesse autrichienne. Essayons de montrer le milieu nouveau de ses affections, les habitudes d’esprit, les caractères, le mode de vie et de mœurs des princes et des princesses avec lesquels elle doit vivre, les sympathies et les antipathies qu’elle doit nécessairement rencontrer. Ce tableau importe à la justice de l’histoire, il importe au jugement de la Dauphine.

Louis XV s’était laissé charmer par la femme de son petit-fils. Cette jeune fille, cette enfant rajeunissait son âme. Ses yeux, las d’habits de cérémonie, se reposaient sur cette robe de gaze envolée et légère, qui faisait ressembler la Dauphine « à l’A-

  1. Correspondance secrète entre Marie-Thérèse et le comte de Mercy-Argenteau, publiée par M. d’Arneth et Geffroy. Paris, Didot, 1875, vol. I.