Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/76

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et, cependant, contre sa popularité, dans l’ombre, sans bruit, mais sans repos, se poursuivait l’œuvre de haine et de destruction commencée le jour même où la Dauphine avait quitté Vienne. Au-dessus de ses ennemis, Marie-Antoinette avait contre elle cette chose abstraite, aveugle, impitoyable, un principe : la politique de l’ancienne France. Cette politique, dont le père du duc de Berry avait été l’apôtre, était, la vieille religion de la diplomatie française ; elle était le prétexte et l’arme de la haine de M. D’Aiguillon contre M. de Choiseul, disgracié par M. d’Aiguillon et madame du Barry presque aussitôt l’installation de la jeune princesse à la cour de France.

Les hommes du parti français, c’est ainsi que ce parti s’appelait, ne voulaient point reconnaître que les lois d’équilibre de l’Europe obéissent au temps et se renouvellent. Ils n’étaient pas satisfaits de ce long effort de la France qui avait successivement rogné de l’empire de Charles-Quint le Roussillon, la Bourgogne, l’Alsace, la Franche-Comté, l’Artois, le Hainaut, le Cambrésis, et l’Espagne, et Naples, et la Sicile, et la Lorraine, et le Barrois. Ils oubliaient le présent de l’Angleterre pour ne se rappeler que le passé de l’Autriche. Qu’était, aux yeux de ce parti, le mariage de Marie-Antoinette, sinon une défaite ? qu’était Marie-Antoinette, sinon le gage et la garde des traités de la nouvelle politique inaugurée sous le règne de madame de Pompadour ? Le chef de ce parti, le petit-neveu du cardinal de Richelieu, l’ennemi personnel du duc de