Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/85

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seul ; elle lui parle de l’immortalité de M. de Choiseul, de ses prodigalités, de son insolence ; de l’indignation du Dauphin contre cet homme qui lui avait manqué de respect, qui « avait osé se déclarer l’ennemi du fils de son souverain[1] ». Puis, remuant les cendres, elle l’entretenait de ces morts subites et extraordinaires de son père et de sa mère, de ces bruits, de ces murmures d’empoisonnement qui montaient tout haut jusqu’à M. de Choiseul. Après avoir ému le Roi, après avoir effacé les impressions que la Reine a pu donner, et les avoir tournées contre elle comme la preuve d’une alliance avec l’ennemi du Dauphin, Madame Adélaïde parle au Roi, comme au nom de son père, des Mémoires que son père a laissé, de ce testament politique écrit pour l’instruction de son fils, et confié à M. de Nicolaï. Un comité est tenu les portes fermées. Un jour que la Reine est au bois de Boulogne avec madame de Cossé, ou sur le balcon de la Muette à jouir des applaudissements de la foule[2], un jour que M. d’Aiguillon et M. de la Vrillière sont dans l’antichambre du Roi, il est fait lecture au Roi de la liste des hommes que la volonté du Dauphin mourant destinait à entourer le trône de son fils devenant roi. Le choix de Louis XVI, il s’appelait lui-même Louis le Sévère alors, se porte sur M. de Machault, et la lettre qui l’appelle au ministère est signée. Mais ce choix

  1. Portraits et caractères, par Senac de Meilhan, 1813.
  2. Chronique secrète de Paris sous Louis XVI, par l’abbé Beaudeau. Revue rétrospective, 1re série, vol. III.