Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/88

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tion de la politique la jeune Reine semble n’avoir eu en vue que le renvoi d’Aiguillon qu’elle appelait le vilain homme. Et peut-être si l’action de la femme du Roi n’avait point été intermittente, et si la princesse n’avait pas obéi seulement aux petits mouvements haineux d’un ressentiment féminin, Madame Adélaïde n’aurait point triomphé ?

Exilée aux promenades, la Reine apprit tout quand tout fut fait. Elle était battue : elle le comprit ; et, ne se faisant point illusion, comme quelqu’un lui disait : « Voici l’heure où le Roi doit entrer au conseil avec ses ministres… — « Ceux du feu roi ! » dit dans un soupir cette Reine à laquelle son avènement au trône ne donnait d’autre influence que le droit d’écrire à la sœur de M. de Choiseul, à madame de Grammont, exilée par la du Barry : « Au milieu du malheur qui nous accable, j’ai une sorte de satisfaction de pouvoir vous mander de la part du Roi qu’il vous permet de vous rendre près de moi. Tâchez donc de venir le plus tôt que votre santé vous le permettra : je suis bien aise de pouvoir vous assurer de vive voix de l’amitié que je vous ai vouée. » Et encore, Marie-Antoinette était-elle obligée d’ajouter en post-scriptum : « Attendez que M. de la Vrillière vous l’annonce[1]. »

Cette déroute des espérances de la Reine était suivie d’un autre échec qui lui arrachait toute illusion et lui révélait la pleine misère de son pouvoir et le néant absolu de ses plus chères volontés.

  1. Correspondance secrète (par Métra), vol. I.