Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/97

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Marche qui fit contre la Reine une sortie violente, Madame Adélaïde incrimina et noircit avec passion, presque avec colère, la vie de la Reine, ses légèretés, ses imprudences, ses courses, ses promenades, tout, jusqu’à ses plus minces amusements et ses plus pauvres consolations. La Reine, en même temps, recevait de Madame Louise une lettre où les conseils touchaient à l’injure, et les reproches à la condamnation. Au sortir du conseil de famille, le Roi, intimidé, se plaignit à la Reine de ce dont on venait de lui faire des plaintes si vives ; la Reine se défendit sur l’usage de Vienne et de sa famille[1]. Ce furent des larmes dans le ménage, plus que des bouderies et des chocs d’humeur, un éloignement, des semences de désunion pour l’avenir, qui sait ? peut-être le premier pas vers un renvoi de la Reine. Impunie, encouragée, la médisance jetait le masque et devenait la calomnie. Tout autour de lui, le Roi entendait le murmure des accusateurs ; tout autour de lui, le Roi voyait des visages qui semblaient plaindre le mari. Qu’un matin la Reine, par un enfantin plaisir, autorisé du Roi, aille voir lever le soleil sur le haut des jardins de Marly, voilà les courtisans à se passer sous le manteau le Lever de l’Aurore, cette calomnie née des calomnies de la cour[2]. Un autre jour, la calomnie allait jusqu’à glisser des vers indignes sous la serviette du Roi[3].

  1. Ibid., par l’abbé Beaudeau.
  2. Mémoires, par Mme Campan.
  3. Chronique secrète, par l’abbé Beaudeau.