Page:Goncourt - Journal, t1, 1891.djvu/120

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quand une vieille population d’une aimable contrée était convenablement anémiée, il lui tombait du Nord sur le dos des bougres de six pieds qui refaçonnaient la race. Maintenant qu’il n’y a plus de sauvages en Europe, ce sont les ouvriers qui feront cet ouvrage-là dans une cinquantaine d’années. On appellera ça, la révolution sociale.

— La loi moderne, le Code, dans la réglementation des choses intéressant la société actuelle, n’a oublié que l’honneur et la fortune. Pas un mot de l’arbitrage de l’honneur : le duel, que la justice absout ou condamne d’après des manières de voir particulières, est jugé sans un texte. Quant à la fortune d’aujourd’hui, qui est presque toute dans des opérations de bourse, de courtage, d’agiotage, de coulisse ou d’agences de change, rien n’a été prévu pour la protéger ou la défendre, cette fortune moderne : nulle réglementation de ces trafics journaliers ; les tribunaux incompétents pour toutes transactions de bourse ; l’agent de change ne donnant pas de reçu.

3 septembre. — Été à la fête des Loges. Tivoli, le bal des blanchisseuses de la localité. Un monde de coquettes fillettes, toutes en blanc passementé de rubans roses, et leurs gentils minois encadrés dans de jolis bonnets de paysannes en dentelle de coton, à garnitures de roses-pompon entremêlées d’aigrettes d’or.