Page:Goncourt - Journal, t1, 1891.djvu/166

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26 octobre. — Une journée passée à l’atelier de Servin. Un farniente sans remords, une flâne majestueuse et déridée, un lundi du pinceau, des rires, de l’esprit abracadabrant, des blagues énormes et pouffantes, et des enfantillages, et des coups de pied au cul, et la gaminerie et la clownerie parisiennes dansant autour des couleurs et des tubes enchantés tenant le soleil et la chair ; enfin, des heures molles, inertes, avachies, et le Temps s’endormant sur le divan, où ces joyeux pitres le bercent avec de la farce, des pantomimes drolatiques, des ironies, des riens, et le complet oubli et la parfaite insouciance du proverbe anglais : Time is money.

— Le café m’apparaît comme une distraction bien en enfance. Il me semble que les siècles futurs trouveront mieux. Dans ces temps, il y aura des endroits où des philtres vous épanouiront la rate, où avec je ne sais quoi, avec un gaz exhilarant, on vous remplira de gaieté pour quarante centimes, et où des garçons vous verseront par tout le corps une sorte de paix et de joie : une demi-tasse de paradis.

De véritables débits de consolation, où l’on détournera le cours de l’âme et la mélancolie de la pensée, pendant une heure.

— Rue Bonaparte, en achetant notre bacchanale enfantine d’Angelo Rossi, on nous montre une terre cuite de Clodion, un bas-relief, haut comme les deux mains, représentant une femme sortant du bain, des parties de corps saillantes en ronde bosse dans le