Page:Goncourt - Journal, t1, 1891.djvu/167

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relief d’une médaille. Elle est debout, de face, près d’un brûle-parfums, en train de tordre, de ses deux mains ramenées en arrière, ses cheveux mouillés, en deux longues tresses. Dans ce corps en retraite, tout fuit et s’efface et s’estompe, sauf une jambe qui avance, un genou qui se détache et sort du fond de la terre rose.

C’est une jeunesse, une gracilité de ligne, une finesse ténue des attaches, un modelage douillet du ventre, une science de tout ce grassouillet virginal et bridé, une grâce délicate comme voilée d’enfance, avec dans une si petite chose, presque la grandeur d’une statue. Un corps de fillette étudié d’un bout à l’autre dans la beauté de la jeune fille plus en bouton qu’en fleur, à l’heure des promesses physiques qui éclosent, à l’heure où la forme de la femme dans son accomplissement, garde encore un peu des élancements et des maigreurs adorables de la jeune fille.

29 octobre. — Marie m’emmène chez Edmond, le grand sorcier des lorettes. Il habite, rue Fontaine-Saint-Georges, une maison toute fleurie de fausses sculptures du XVIe siècle, avec des chouettes de pierres dans les niches des dessus de fenêtres. Une vieille femme à cheveux blancs vous introduit dans une salle à manger, où sont encadrées, sur fond noir, des mains découpées sur du papier blanc et ponctuées de lignes, et margées d’annotations tracées à la plume. Il y a là, la main de Robespierre,