Page:Goncourt - Journal, t1, 1891.djvu/254

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le conseil de revision me trouvant trop bel homme pour être myope, me nomma à la majorité des voix : hussard.

Je vais à l’Hôtel de Ville pour la troisième fois, ce soir, mais au bal. Cela est riche et cela est pauvre. De l’or, et puis c’est toute la magnificence des salles et des galeries ; du damas partout et à peine du velours, le tapissier en tout lieu, l’art nulle part ; et sur les murs chargés de plates allégories, peintes par des Vasari dont je ne veux pas savoir le nom, moins d’art encore qu’ailleurs… Ah ! la galerie d’Apollon ! la galerie d’Apollon ! Mais l’émerveillement des douze mille paires d’yeux qui sont là, n’est pas bien exigeant.

Pour le bal, c’est un bal. L’on se coudoie et même l’on valse, et c’est là que j’ai vu valser une institution vieille comme le général Foy : ce n’étaient qu’élèves de l’École polytechnique voltigeant dans des robes de gaze bleue ou rose.

Ce qui m’a plus frappé, et ce qui est vraiment une belle chose, ce sont les encriers syphoïdes du Conseil municipal : on les voit, ils sont ouverts au public, ces grands jours-là. Ces encriers sont monumentaux, sérieux, graves, recueillis, carrés, opulents, imposants. Ils ont tout à la fois quelque chose des pyramides d’Égypte et du ventre de M. Prud’homme : ils ressemblent à la fortune du Tiers-État.

— Quand le XVIIIe siècle va mourir et que la grâce de Watteau en cet art d’esprit, n’a plus que le