Page:Goncourt - Journal, t1, 1891.djvu/255

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souffle, il tombe dans l’art français, une invasion de lourds barbares qui se gracieusent, de teutomanes qui font les gentils : les Wille, Schenau, Freudeberg, etc., — et même Lawreince.

Mai. — C’est une drôle de chose — et personne ne l’a remarqué — que le grand monument littéraire de l’atticisme, des élégantes mœurs, du délicat esprit d’Athènes, Aristophane enfin, soit le plus gros monument scatologique de la littérature de tous les peuples. La m.... y est le gros sel et la m.... y semble le dieu du Rire. Qu’on me parle du goût raffiné des spectateurs des Nuées, de Lysistrata, des Grenouilles, allons donc ! La délicatesse d’esprit est une corruption, longue, longue à acquérir, et que ne possèdent jamais les peuples jeunes. Ce ne sont que les peuples usés, les peuples auxquels ne suffisent plus les sièges de fer et les bains de marbre, les peuples au corps douillet et lassé, les peuples mélancolieux et anémiés, les peuples attaqués de ces maladies de vieillesse qui viennent aux arbres fruitiers qui ont trop porté.

6 mai. — La langue javanaise, la langue argotique de toutes les impures de Paris, — le croirait-on, — a été inventée à Saint-Denis, par les pensionnaires pour se cacher des sous-maîtresses. Mais c’est un javanais plus compliqué que celui qui met un va après chaque syllabe : dans celui-ci, après chaque syllabe, il y a un doublement de deux syllabes à la