Page:Goncourt - Journal, t5, 1891.djvu/292

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sant sur sa physionomie qui fait la morte, sur cette chair qui a pris le beau et chaud culottage de la chair d’un syndic de Rembrandt, et quand sa parole s’anime, il y a sur son front un étrange tressautement de la ligne de ses cheveux blancs, qui monte et redescend.

Hugo esthétise ainsi sur Michel-Ange, Rembrandt, Rubens, Jordaens qu’il met, par parenthèse, fort à tort, au-dessus de Rubens.

Nous restons seuls, toute la soirée, sans un coup de sonnette d’homme politique dans ce parlage d’art et de littérature. Et à onze heures, tout le monde se lève et s’en va, Hugo mettant sur sa tête un vieux chapeau de Castelar, que l’Espagnol lui a laissé en place d’un plus neuf.

Lundi 13 mars. — Tourguéneff parlait du comique, se mêlant quelquefois aux actes héroïques.

Il contait qu’un général russe, après une attaque, deux fois repoussée par les Français retranchés derrière le mur d’un cimetière, avait commandé à ses soldats de le jeter par-dessus le mur.

« Eh bien, comment ça s’est-il passé ? » — demandait Tourguéneff au général en question, un très gros homme.

Et voici ce que le général lui racontait. Il s’était trouvé dans une flaque d’eau, au milieu de laquelle il essayait de se relever et de se remettre sur ses