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me rendrait malade, si je n’obéissais pas à son obsession. »

Tout en taillant une pièce, dans Thérèse Raquin, il est, dans le moment, en train de chercher un roman sur les Halles, tenté de peindre le plantureux de ce monde.

Et une partie de la journée, je cause avec cet aimable malade, dont la conversation se promène, d’une manière presque enfantine, de l’espérance à la désespérance. « Le journalisme, dit-il, au fond, lui a rendu un service. Il lui a fait facile le travail, qu’il avait autrefois très difficile. C’était une espèce d’afflux d’idées et de formules, s’engorgeant à tel point, qu’il était quelquefois, au milieu de son travail, obligé de lâcher la plume. Aujourd’hui c’est un flux réglé, un courant moins abondant, mais coulant sans encombre. »

Mardi 4 juin. — Ce soir, au dîner des Spartiates, Robert Mitchell, fait prisonnier à Sedan, et enfermé dans une citadelle, pour avoir refusé le salut à un officier prussien, racontait que sa grande distraction, était de voir faire l’exercice, d’être témoin des soufflets, que les officiers donnaient aux soldats. Et il faisait la remarque que, de toute la chair ainsi frappée, rien ne rougissait que la place des cinq doigts.

Il raconte encore que, chargé par des officiers de la garde impériale d’offrir à l’Empereur leurs per-