Page:Goncourt - Journal, t7, 1894.djvu/105

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de la salle, et qui la voient se terminer par le succès ordinaire d’une pièce qui réussit.

Tout le temps de la pièce, Daudet ne voulant pas se montrer dans la salle, — j’ai été le téléphone entre le mari et la femme. — Daudet repris à dîner bien mal à propos de ses douleurs, et qui a pris du chloral, se tient enfermé dans le cabinet de Koning, sourd aux applaudissements. Là, après avoir fumé sept ou huit londrès, le tabac et le chloral faisant leur effet, Daudet a un peu dormichonné. Et réveillé par l’émotion de Belot et des acteurs désarçonnés par le refroidissement du quatrième acte, il croit presque à un insuccès.

Quelques amis et moi nous remontons Daudet et Belot, qui à la fin s’écrie : « Oui, oui, nous avons devant nous cinquante représentations qui feront de l’argent ! »

Là-dessus, on va souper rue de Bellechasse, où sont réunies une quarantaine de personnes, parmi lesquelles se trouve le ménage Koning. Cette Hading est vraiment très séduisante avec sa luxuriance de cheveux, semblables aux cheveux mordorés des courtisanes vénitiennes, avec sa blancheur de peau toute particulière, et qui me rappelle la blancheur de la gorge de la maîtresse du Titien, dans son fameux portrait, avec ses regards coulants dans le coin des yeux, avec l’ombre fauve de la cernure de ses yeux et du tour de sa bouche, avec son petit front et son nez droit. Elle me rappelle beaucoup ces bustes gallo-romains du musée d’Arles, où dans le pur type grec