Page:Goncourt - Journal, t7, 1894.djvu/219

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

paroles de l’homme qui est derrière la porte, ne vont pas, tout à coup, éveiller chez vous l’idée du silence éternel.

Potain, une curieuse physionomie, avec l’humaine tristesse de sa figure, son crâne comme concassé, son œil rond de gnome, sa réalité un peu fantastique. Il m’examine, m’ausculte longuement, au bout de quoi, en dépit de mes convictions intimes, et de tout ce que je peux lui dire de mes maux, il m’affirme qu’il n’y a ni néphrétisme, ni hépatisme chez moi, que je suis un rhumatisant, un rhumatisant ayant un rhumatisme sur l’estomac, et qu’il me faut les eaux de Plombières.

En sortant de chez Potain, nous prenons le train pour Champrosay, où je dîne. Daudet n’en savait pas plus que moi, du « Manifeste des Cinq » qui ont commis leur méfait dans le plus profond secret. Et le relisant tous deux, nous trouvons le manifeste mal fait, d’une écriture renfermant trop de termes scientifiques, et s’attaquant trop outrageusement à la personne physique de l’auteur.

Dimanche 21 août. — Ce soir, à dix heures, au moment de me coucher, on m’annonce Geffroy, qui touché et peiné des éreintements de ma personne, à propos du « Manifeste des Cinq », me lit un article qu’il vient de faire, et qui nous dégage, moi et Daudet, de toute participation au Manifeste. Mais je lui