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de beaux yeux et un air aimable, l’homme, une tête à la détermination froide, et s’exprimant avec une netteté de la pensée et une correction de paroles, remarquables.

Il nous entretient, et très bien, de beaucoup de choses, entre autres de l’exécution de Barré et de Lebiez. Il était alors attaché au maréchal, et a pu assister à leur réveil, qui est une chose émotionnante même pour le directeur de la prison, — et où le silence, le terrible silence entre les paroles dites, — est d’un effet qu’on ne peut exprimer. Il nous décrivait, au moment où avait été annoncé à Barré le rejet de son pourvoi, l’affaissement, pour ainsi dire, la mort physique de l’homme, qu’on était obligé d’habiller, de porter, de soulever, comme un être qui n’était plus vivant.

Lebiez, lui, au contraire, montra un courage extraordinaire. Walewski le vit s’efforcer d’écarter le prêtre, qui s’était mis devant lui, pour apercevoir de côté la guillotinade de son camarade, et lorsqu’on lui cria : « Bravo, Lebiez ! » il le vit encore parfaitement regarder en l’air, et chercher d’où venait l’applaudissement, avec le sang-froid d’un individu, qui serait tout autre part que sur l’échafaud.

Mercredi 7 septembre. — La comtesse de Beaulaincourt, la ci-devant marquise de Contades, contait aujourd’hui, que les deux fois qu’elle avait dîné, dans