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de Saint-Victor, de Doré, et surtout tout un gros paquet de lettres d’About, qu’il déclare tout à fait charmantes de passion et d’esprit.

Delzant me dit, que la grande fortune d’Ozy n’a pas été faite par les dons, cependant très considérables, que lui ont faits ses amants, mais bien plutôt par les placements qu’elle a fait faire de ces dons par ses amants, qui étaient presque tous des gens de bourse. Du reste elle ne poussait pas ses amants à la prodigalité de choses bêtes, comme des bijoux, des diamants, elle était pour les choses sérieuses. C’est ainsi que M…, qui a été quinze ans son entreteneur en titre, invariablement, Ozy lui demandait dix, vingt, trente Lyon (actions du chemin de fer), au lieu de tout objet quelconque, qu’il était décidé à lui offrir.

Delzant est chargé de la direction de son tombeau, un tombeau monumental, mais tout fier qu’il soit d’avoir été choisi pour la direction artistique, il est ennuyé de ce que la défunte exige là dedans, de la sculpture de Doré… Sur quoi, je ne puis m’empêcher de lui dire : « Mais, voilà une occasion d’ériger dans son format gigantesque La Bouteille de Doré, et d’en faire la pyramide de celle qu’on accusait parfois de se piquer le nez. »

Bracquemond, que je n’ai pas vu depuis des siècles, remplace Delzant. Il entre d’un pas traînant, se laisse tomber sur un fauteuil, et d’une voix qui n’a plus sa chaude nervosité sourde, il se plaint de maux d’entrailles qui l’ont fait maigrir de quinze