Page:Goncourt - La Fille Élisa, Charpentier, 1877.djvu/101

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l’argent de toutes choses, l’argent pour assoupir les dettes criardes des années précédentes, l’argent pour payer les frais arriérés d’une prétendue condamnation, enfin tout l’argent que gagnait Élisa. Ses chemises usées, elle arriva à ne pouvoir les remplacer, et n’eut bientôt plus à se mettre sur le dos que la robe indispensable pour faire le trottoir. En récompense de cette misère, Élisa n’obtenait cependant que des paroles à l’adresse d’un chien, parfois des coups. Et la femme, aux mains batailleuses, se laissait maintenant frapper, sans se rebiffer. Elle ne se plaignait pas, ne se lassait pas, ne se rebutait pas. De jour en jour plus maltraitée et plus dépouillée, elle devenait plus douce, plus soumise, plus prévenante, comme si elle trouvait, parmi les impitoyables exigences de l’entretenu, un martyre aux douces et exaltantes tortures. Il semblait qu’Élisa ressentait une jouissance orgueilleuse dans le sacrifice, et on aurait vraiment dit qu’elle était reconnaissante à cet homme de tout ce qu’il lui faisait