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OBLOMOFF.

novice… Ah ! il ne faut pas que j’oublie d’aller lui chercher des camélias…

— Encore ! mais laissez donc, venez plutôt dîner ! Nous causerons. Il m’arrive deux malheurs…

— Je ne puis : je dîne chez le prince Tuméneff ; on y verra tous les Goriounoff, et elle, elle !… la petite Lydie, ajouta-t-il à l’oreille. Pourquoi donc négligez-vous le prince ? Quelle maison amusante ! Et sur quel pied elle est tenue ! Et la villa ? inondée de fleurs ! On y a ajouté une galerie… gothique ! On dit qu’en été on y dansera, on fera des tableaux vivants. Vous y viendrez quelquefois ?

— Non, je crois que je n’irai pas.

— Ah ! quelle maison ! Cet hiver, les mercredis, il n’y avait jamais moins de cinquante personnes, et quelquefois il en venait jusqu’à cent…

— Dieu de Dieu ! quel infernal ennui ça devait faire !

— Que dites-vous ? De l’ennui ! Mais plus on est de fous, plus on rit. Lydie y est allée quelquefois, je ne la remarquais jamais, mais tout à coup…

En vain de l’oublier je m’impose la peine,
Et veux que la raison brise ma douce chaîne…

En chantant ces vers, il s’oublia jusqu’à s’asseoir dans le fauteuil, mais il bondit soudain, il se leva et se mit en devoir d’épousseter son habit.