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OBLOMOFF.

grugent. C’est là qu’on voit la peinture des femmes déchues de toutes les classes… les Françaises, les Allemandes, les Finnoises et tout, tout…, avec une vérité renversante et palpitante… j’ai entendu quelques extraits… l’auteur est grand ! On reconnaît en lui tantôt Dante, tantôt Shakespeare…

— Où diable vous emportez-vous ! dit Élie en se soulevant de surprise.

Pennkine se tut, sentant qu’en effet il s’était emporté trop loin.

— Quand vous aurez lu le livre, vous jugerez vous-même, ajouta-t-il avec plus de calme.

— Certainement non, Pennkine, je ne le lirai point.

— Pourquoi ? Cela fait du bruit, on en parle…

— Eh ! qu’on en parle ! Il y a des gens qui n’ont rien d’autre à faire que de parler. C’est là surtout qu’il y a beaucoup d’appelés.

— Mais lisez, ne fût-ce que par curiosité.

— Qu’y lirai-je que je ne connaisse pas ? dit Oblomoff. Pourquoi écrivent-ils ? Uniquement pour s’amuser eux-mêmes…

— Comment ! Eux-mêmes ! Et la réalité donc ? Et quelle réalité ! Quelle ressemblance ! C’est à mourir de rire. De véritables portraits vivants. Dès qu’ils tombent sur quelqu’un, marchand, employé, officier, sergent de ville, ils l’impriment tout vif.