Page:Gorki - Ma Vie d’enfant.djvu/208

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

prêt à vibrer au moindre choc ; et comme toujours en ces moments-là, il me poussa sur tout le corps des yeux et des oreilles ; ma poitrine se dilata tellement que j’eus envie de crier.

— Va-t’en, Alexis ! commanda grand-père d’une voix sourde.

— Pourquoi ? interrogea ma mère en m’attirant de nouveau à elle. Tu ne partiras pas, je te le défends.

Elle se leva, flotta parmi la chambre comme un nuage crépusculaire et s’arrêta derrière mon aïeul.

— Papa, écoutez…

Il se tourna vers elle et glapit :

— Tais-toi !

— Eh bien, moi, je ne vous permets pas de grogner avec moi ! articula-t-elle tout bas.

Grand’mère quitta le canapé et la menaça du doigt :

— Varioucha !

— Attends ! grommela grand-père en se laissant tomber sur une chaise… Qui suis-je, moi ? Hein ? Comment oses-tu ?…

Et soudain, il se mit à hurler d’une voix qui n’était pas la sienne :

— Tu m’as déshonoré !

— Va t’en, m’ordonna grand’mère, et cette fois j’obéis.

Mais je grimpai sur le poêle de la cuisine et j’écoutai ce qui se passait derrière la cloison ; tantôt, ils parlaient tous ensemble et s’interrompaient mutuellement, tantôt ils se taisaient comme des gens qui s’endorment. Il était question d’un enfant