Page:Gorki - Ma Vie d’enfant.djvu/63

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est vieux, il est devenu avare et préfère l’argent à ses propres enfants ! Il aime ce qui ne lui coûte rien ! Quant à Mikhaïl et à Jacob…

Elle laissa retomber le bras et se tut un instant, puis, jetant un coup d’œil sur sa tabatière ouverte, elle ajouta en grommelant :

— Ici, l’affaire est plus embrouillée ; quand une femme aveugle fait de la dentelle, il est difficile de reconnaître le dessin. Si l’on prend Tziganok en flagrant délit, on le battra jusqu’à ce que la mort s’ensuive…

Et après une nouvelle pause, elle acheva :

— Ah ! Il y a beaucoup de règlements chez nous, mais point de justice ni de vérité…

Le lendemain, je suppliai Tziganok de ne plus voler.

— Si on t’attrape, on te battra et tu mourras…

— Je ne me laisserai pas pincer ; d’ailleurs je saurai bien me tirer d’affaire ; je suis débrouillard ; je suis agile, me répondit-il en riant ; mais presque aussitôt son front se rembrunit. Ah ! je sais bien que c’est mal et que c’est dangereux de voler. Si je le fais, c’est comme ça, par ennui. Et je n’économise rien, car, pendant la semaine, les oncles me soutirent tout. Cela m’est bien égal au reste. Qu’ils le prennent, cet argent ! Moi, j’ai tout ce qu’il me faut !

Soudain, il me saisit dans ses bras et me secoua doucement :

— Tu es léger, tu es fluet, mais tu as des os solides ; tu seras un fort gaillard ! Sais-tu ce que tu devrais faire ? Demande à ton oncle Jacob qu’il t’apprenne à jouer de la guitare. Il est vrai que tu es encore petit,