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Page:Gosset - Histoire du Moyen-Âge, 1876.djvu/201

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ONZIÈME SIÈCLE

les propres fils de l’Empereur. Trahi par tout le monde, Henry IV passa les dernières années de sa vie à combattre ses enfants, tomba entre les mains du plus jeune Henry, fut dépouillé de la dignité impériale à la diète de Mayence 1105 et, toujours sous le coup des anathèmes de l’Église, essaya d’aller vivre à Liége où il mourut de faim ; son corps fut exhumé et jeté à la voirie comme celui d’un excommunié : Grégoire VII était vengé.

Ainsi l’idée, si énergiquement affirmée par Hildebrand, d’un gouvernement théocratique, avait jeté de profondes racines et s’imposait à ses successeurs. Les humiliations acceptées par les souverains de Germanie et de Gaule, impliquaient la reconnaissance tacite de cette suprématie religieuse. Grégoire VII s’était en effet persuadé que rien ne devait échapper à sa domination, et suivant du regard la formation des nouveaux royaumes chrétiens d’Espagne, occupés par les fils de Sancho-le-Grand depuis 1037, il s’était empressé de réclamer l’hommage des monarques de la Péninsule, sous prétexte que toute terre conquise sur les infidèles était terre de l’Église. Les rois espagnols s’étaient soumis, non sans difficulté sentant la nécessité d’affermir leurs conquêtes par une consécration religieuse. Leurs progrès sur les Arabes s’étaient accrus depuis Sancho III dont le règne victorieux avait préparé la substitution de la maison basque d’Aznar à la race de Pélage. Son second fils, Ferdinand, à la mort de Bermud, avait réuni sous son autorité Léon et Castille. À partir de cette époque (1037), l’Espagne catholique s’était trouvée constituée en trois royaumes : Navarre au nord, Aragon au nord-est, Castille et Léon au nord-ouest.

L’organisation de ces trois États, gouvernés par les trois frères, de la maison de Navarre, avait été singulièrement favorisée par le démembrement que subissait l’Empire musulman depuis la mort du glorieux Hagib Al-Manssoûr. Le renvoi de la garde africaine par l’usurpateur Muhamad avait ouvert la série de ces dissensions sanglantes qui devaient anéantir la puissance de l’Islam en Espagne.