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DOUZIÈME SIÈCLE

Sur ces entrefaites, l’Europe terrifiée reçut la nouvelle de l’expulsion des chrétiens de la Palestine et de la prise de Jérusalem par le sultan Salâh-Ed-Din Yousef-Ebn-Ayoub (Saladin). Ce musulman avait renversé du trône d’Égypte, en 1171, la dynastie des Fatimites et s’était rendu indépendant du sultan d’Alep, Nourreddin. À la mort de ce dernier, il n’hésita pas à prendre les armes contre son nouveau souverain Al-Malek, et s’empara de Damas (1181). Son gouvernement, plein de sagesse et d’équité, lui valut peu à peu la soumission du pays entier, dont la capitale, Alep, ouvrit enfin ses portes. Salâh-Ed-Din, maître de l’Égypte et de la Syrie, régna de l’Euphrate au Nil, avec le titre de sultan, que lui confirma le khalyfe Nasser. Les chrétiens, en attaquant les pèlerins qui se rendaient à la Mekke, lui fournirent l’occasion de conquérir la Palestine. Une grande bataille se livra dans la plaine de Tibériade, où les chrétiens furent écrasés (1187). Le roi Guy de Lusignan, le grand maître des Templiers et une foule de chevaliers restèrent prisonniers des Sarrasins. Cette victoire eut pour conséquence immédiate la prise de Saint-Jean-d’Acre, de Saïd, de Beyrout et enfin de Jérusalem.

Ces événements produisirent en Europe une émotion universelle, et les monarques d’Allemagne, de France et d’Angleterre prirent la croix. Frédéric Barberousse partit le premier à la tête d’une armée de cent mille hommes. Par ses habiles dispositions, il surmonta les obstacles qu’avaient rencontrés jusqu’alors ces longues expéditions par terre, évita les embûches de l’empereur grec Isaac l’Ange et dirigea sa marche à travers l’Asie Mineure. Il avait déjà battu les Turks à Philomelium et à Iconium, lorsqu’il périt inopinément, le 10 juin 1190, près de Séleucie, en voulant traverser à la nage les eaux glaciales du Cydnus. Ainsi finit ce puissant Empereur ; s’il avait tous les défauts et toutes les qualités de son époque, par la rare culture de son esprit il était supérieur à la plupart de ses contemporains. Sa correspondance avec l’évêque de Freisingen Otton est un des plus intéressants monuments de l’histoire d’Allemagne. Ce long et glorieux