Page:Gouges - Description de la fete du 3 juin, 1792.djvu/3

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Rappellez-vous, madame, qu’à cette époque le peuple français n’étoit pas seulement asservi, mais condamné aux fers des esclaves ; en vain le noble cultivateur arrosoit le champ de ses sueurs et de ses larmes ; il nourrissoit les hommes et il manquoit lui-même de pain ; les anciennes déprédations de la cour avoient comblé la mesure des calamités publiques : la révolution germoit dans toutes les ames, et le soulèvement général s’est produit comme l'éclair, qui brise dans un instant les nuages qui couvrent l’astre du jour ! Le tonnerre lui succède rapidement, la foudre éclate et le ciel devient pur et serein.

Au nom de vos plus chers intérêts, madame, rapprochez-vous de la consolante philosophie ; au nom de la patrie ne consultez plus que sa morale qui vous instruira mieux que moi de tout ce qui vous reste à faire, pour régner sur un peuple libre.

Tels sont les vœux d’une citoyenne qui ne cherche point l’éclat, et qui vivra trop heureuse dans l’obscurité, si son dévouement pour la cause publique, peut assurer votre bonheur et celui de l’empire.

Je n’ai point un esprit de cour, madame ; mais si le hasard avoit voulu me placer dans le nombre des femmes qui vous entourent, et qu’il m’eût conservé le caractère qu'il m'a donné, vous ne seriez point dans l’affreuse position où vous vous