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Page:Gouraud - Dieu et patrie, paru dans La Croix, 1897.djvu/344

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au bord desquels je vois une sentinelle, j’ai le temps d’aller embrasser mon frère. »

Tout de suite, il courut à la tente de son colonel.

« Mon colonel, donnez-moi une heure de permission, voyez cette lettre. »

Le brave Lahoul lut d’un regard.

« Mon cher enfant, vous avez peut-être tort, il va y avoir une alerte cette nuit, je crois.

— Je serai de retour, mon colonel, j’ai tant envie de voir mon frère !

— Alors, allez, mais n’oubliez pas ; rapidité et prudence. »

Henri partit après avoir averti François qui devait toute la nuit faire des patrouilles. Il négligea le pont et s’en alla plus bas où un passeur le déposa sur l’autre rive en quelques minutes.

Le talus en face s’élevait couvert de vignes et, sur le plateau, la fumée du bivouac allemand montait dans le ciel.

Au : « Qui vive ! » poussé par le factionnaire, Henri répondit :

« Freum[1]. »

Le soldat s’avança, et Henri expliqua son but.

« Oui, le lieutenant est ici, il relève les postes. Dans un instant, il sera venu. Je ne peux vous laisser aller plus loin, mais vous pouvez l’attendre.

— Est-il à portée de voix ?

— Je pense que oui.

— Bon. »

Le jeune homme se mit alors à pousser le « houhou » de leur enfance. Ce cri qui, dans les bois de Rantzein, ralliait les deux frères et qu’ils percevaient de si loin.

La nuit était très fraîche ; les arbres à

  1. Ami.