Page:Gourmont - Le IIme Livre des masques, 1898.djvu/180

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Comme c’est beau, un soir d’été !
Le silence béni s’emplit
De l’odeur du blé qui fait le pain.
Les seigles, et les luzernes, et les sainfoins et les haies,
Les rondes au sortir des villages, la tranquillité de tous les êtres…


Et Cébès meurt. Et Tête d’or, des bras du cadavre passionné, bondit à l’action avec un désespoir froid, un mépris sombre ; il pense, dès cette minute, ce qu’il dira plus tard :


Quelle différence y a-t-il entre un homme et une taupe qui sont morts,
Quand le soleil de la putréfaction commence à les mûrir par le ventre ?


Simon est devenu le conquérant, Simon Agnel, que ses cheveux de femme blonde disent Tête d’or. Général vainqueur, il tue l’Empereur et s’empare du trône. La scène est shakespearienne, et même trop ; avec ses revirements de la foule dominée par une volonté, elle rappelle trop l’ironie de Jules César. L’ironie, dans Shakespeare, est plus sûre, plus vraie, plus simple ; l’auteur de Tête d’or nous montre trop la logique dans l’illogisme de la foule, mais cela reste beau par le tonnerre de paroles hautaines et brutales et par un geste : Tête d’or a jeté son épée au peuple qu’il veut mépriser