Page:Gourmont - Le IIme Livre des masques, 1898.djvu/213

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Comme tous les poètes sûrs de leur instrument et assurés qu’un excès d’émotion ne leur fera pas trembler la main, M. Fontainas est capable de très curieuses virtuosités. Il n’abuse pas de son adresse à emmêler les sons et les images, peut-être par dédain, mais on voit qu’il serait très capable de composer en perfection les poèmes à forme fixe les plus compliqués et les plus décourageants. Voici une page à laquelle pour être une sextine il n’a manqué que la volonté du poète : alors Banville l’eût citée parmi les modèles, et elle semble d’ailleurs une fleur destinée à tous les futurs florilèges :


Sur le basalte, au portique des antres calmes,
Lourd de la mousse des fucus d’or et des algues
Parmi l’occulte et lent frémissement des vagues
S’ouvrent en floraisons hautaines dans les algues
Les coupes d’orgueil de glaïeuls grêles et calmes.

Le mystère où vient mourir le rythme des vagues
Exhale en lueurs de longues caresses calmes,
Et le rouge corail où se tordent des algues
Étend à la mer des bras sanglants de fleurs calmes
Qui mirent leurs reflets sur le repos des vagues.

Et te voici parmi les jardins fleuris d’algues