Page:Gourmont - Le IIme Livre des masques, 1898.djvu/246

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mation des personnalités. À chaque homme nouveau, le mystère recommence. La botanique n’est pas applicable aux plantes humaines : au degré de différenciation où les hommes sont arrivés, chaque exemplaire de l’humanité est une terre inexplorée, — et inexplorable, puisque, relativement à ta conscience, l’homme lui-même, avec sa pensée comme avec ses gestes, est un fragment du monde extérieur.

Mikhaël était ainsi : doux et fier, plein d’un ennui très triste :


Mais le ciel gris est plein de tristesse câline
ineffablement douce aux cœurs chargés d’ennuis.
. . . . . . . . . . . . . . . . . .
L’ennui, rythme dolent de flûte surannée.
. . . . . . . . . . . . . . . . .
Chère, mon âme obscure est comme un ciel mystique,
Un ciel d’automne, où nul astre ne resplendit…
. . . . . . . . . . . . . . . . . .
Je sombre dans un grand et morne nonchaloir.
. . . . . . . . . . . . . . . . .
N’écoute pas le cri lointain qui le réclame,
Les conseils exhalés dans la senteur des nuits.
Tu sais que nul baiser libérateur, mon âme,
Ne rompt l’enchantement de tes subtils ennuis.