d’un être d’exception, mais qui a gardé toute la beauté de sa logique naturelle. Le drame final, si elle l’a perçu, ne l’a pas surprise, et peut-être alors a-t-ellc rendu grâce au destin qu’une vie exceptionnelle eût une fin tragique : « Parfois, disait-elle, le destin choisit l’un de nous pour en faire un poème magnifique ou pour s’en gorger comme d’Œdipe ou de Médée…[1]. » Si le dénouement, quoique sanglant, avait été obscur comme la chute dans un abîme, elle en eût encore apprécié la realité, en eût joui peut-être immensément. Son âme n’était pas « une infante en robe de parade » ; Élisabeth méprisait trop les hommes pour s’orner à leur intention ou d’un manteau de cour, ou d’une agonie tragique. Elle n’aimait qu’elle-même ou ses pareilles ; mais ses pareilles étaient rares, comme ses illusions furent brèves et mystérieuses.
Faite pour l’éclat du soleil et du trône, elle cache sa face et son cœur ; elle doit tolérer qu’on la regarde, elle ne veut pas qu’on la voie : son éven-
- ↑ Page 98. Et (page 259) les tragiques paroles : « Je marche toujours à la recherche de ma Destinée : je sais que rien ne peut m’empêcher de la rencontrer, le jour où je dois la rencontrer. Tous les hommes doivent, à un certain moment, se mettre en route à la rencontre de leur Destinée. Le Destin, pendant longtemps, tient ses yeux fermés, mais un jour il vous aperçoit tout de même. »