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Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér3, 1924.djvu/183

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comme la bonté, la bienfaisance l’humanité, la douceur, et on croit l’épurer en rapprochant son culte de celui de la religion. Quelle froide conception !… » Il continue en disant que l’amour n’a d’autre effet que d’être un excitant général ; l’amour exalte : il pousse aussi bien à toutes les vertus qu’à tous les crimes, selon les circonstances, fait des héros ou des monstres, donne de la timidité et de la fureur, de la perfidie ou de la bonté, « Quelquefois, ces sentiments opposés se succèdent en un moment dans le cœur de l’homme passionné, et son véritable caractère est de n’en conserver aucun. » Là-dessus il raille Mme de Staël, qui voudrait que Julie n’eût pas succombé… « Je devine, dit-il, le tableau qu’on préférerait : celui d’une jeune fille reculant d’horreur à l’aspect de l’amour heureux, et se faisant religieuse pour servir de modèle aux femmes tendres. Voilà ce qui s’appellerait une vertu honnête !… » Je crois que Mme de Staël a seulement voulu dire qu’une jeune fille raisonnable attend d’être mariée pour prendre un amant : tout le monde approuvera un conseil aussi prudent. M. Necker « était plutôt fait pour devenir un ange gardien qu’un grand ministre » ; il fut tout le contraire de sa fille.

Champcenetz, qui passait pour avoir beaucoup d’esprit, n’en a pas mis beaucoup dans ses écrits, elles écrits de cet homme si gai, s’ils ne sont pas