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Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér3, 1924.djvu/267

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cas comme en plusieurs autres, suivre l’exemple des Chinois, qui avaient érigé en plein air, dans une vaste plaine, les tombeaux de leurs anciens empereurs. Je verrais fort bien une de nos forêts transformée en Panthéon. Parmi les arbres, au bord des ruisseaux, dans les hautes herbes, de partout, au hasard, surgirait la figure d’un des hommes qui ont été, pendant leur vie, les représentants du génie de la France. Rien de funèbre : une assemblée glorieuse, des fronts souriants et méditatifs. On renoncerait à l’habitude de représenter les hommes qui moururent vieux dans l’état le plus avancé de leur âge. Aucun ne devrait être figuré sous les traits d’uu homme âgé de plus de quarante ans, et quant aux femmes on les montrerait toutes dans la fleur de leur jeunesse et de leur beauté, même quand la beauté n’aurait pas été leur qualité dominante. J’y voudrais aussi quelques images symboliques des Poésie, des Rêve, des Sagesse et même des Folie, marbres élégants qui charmeraient les promeneurs las de méditer et sur l’œuvre et sur la destinée des grands hommes. La vigne grimperait à la stèle de Rabelais et le lierre mélancolique à celle de Lamartine. Hugo méditerait à l’ombre d’un chêne et Musset, sous un saule. Michelet se sentirait revivre parmi la nature dont il a chanté les luttes et les ivresses. Pasteur ne serait-il pas à l’aise parmi le