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Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér3, 1924.djvu/422

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et s’en souciait peu. La science chrétienne était là pour répondre à la science sans Dieu. Ne pouvait-elle pas se vanter d’un Newton et d’un Pasteur ? La foi de Pasteur était une garantie de sa science, en même temps que sa science était une garantie de sa foi. Un grand savant est toujours un grand croyant et Pasteur le prouva bien, lorsqu’il entreprit ces mémorables expériences qui devaient anéantir la néfaste croyance à la génération spontanée.

Le raisonnement qu’il faisait pour la science, M. Lecamus le faisait pour les lettres, et il était persuadé que le véritable talent est toujours uni à la foi. Si tel écrivain, par hasard, gênait sa théorie : « Attendez, disait-il, Dieu sait choisir son heure », et les événements souvent lui donnaient raison. Avec quelle joie M, Lecamus avait-il salué les conversions célèbres de notre temps ! « Tous les grands esprits nous reviennent tôt ou tard. » Il ouvrait déjà les bras à M. Edouard Rod. Un jour il dit à un libre penseur, qui le pressait : « Vous avez Marcel Prévost et Lucien Descaves, soit ; nous avons J.-K. Huysmans et René Bazin. » L’autre ne trouva rien à répondre.

La conversion de M. Huysmans lui avait causé une véritable allégresse, car il estimait en secret cet écrivain naturaliste auquel les plaisirs du monde inspiraient tant de dégoût. Il avait toujours cru