Aller au contenu

Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér3, 1924.djvu/43

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

biologie, et ce sérail une erreur grave de considérer l’évolution des sociétés humaines d’un autre œil que l’évolution des autres sociétés animales. Toute révolution est donc bienfaisante par définition même. C’est un mal aigu qui secoue l’organisme en vue du rétablissement de l’équilibre qu’un mal chronique tendait à détruire. Si l’espèce humaine arrivait, selon l’expression célèbre, à « clore l’ère des révolutions », la dissolution serait proche, proche le moment du retour de l’espèce à l’état purement animal, proche, étant données sa débilité physique et sa faible adaptation naturelle, sa disparition quasi totale. Loin donc de protester contre les révolutions et, comme s’exprime Chateaubriand, contre les innovations, il faut les accueillir comme des gestes hautement conservateurs. Qui dit révolution dit conservation des énergies vitales. Au sens actuel, l’esprit conservateur témoigne au contraire d’un appétit dépravé pour la décadence, pour la dégradation continue des forces.

L’idée de Chateaubriand est incomplète, mais juste dans sa première partie. Les révolutions anciennes ressemblèrent beaucoup aux révolutions les plus récentes. C’est ce qui lui permet, sans être trop ridicule, d’établir de constants parallèles entre Pisistrate et Robespierre, Lycurgue et Saint-Just, Harmodius et Marat. Cependant, il ne faut pas