Elle lui répond, car elle est dans un pareil état d’esprit, par une ballade qui à pour refrain :
Et tout pour vous, biaus dous loyaus amis[1].
« Otez de votre cœur douleur et ennui, car toute ma vie, vous ne me trouverez lasse de faire chose qui vous doive plaire. » Donc, soyez en joie et en liesse. Pour cela, je vous envoie cette ballade « que j’ai puisée en la fontaine de larmes où mon cœur baigne quand je vous vois si malheureux ». Et elle revient sur le sentiment de fierté qu’elle éprouve à l’idée que leurs amours vont être divulguées par son amant, par celui qui est pour elle la plus chère chose qui soit au monde. Et de cela elle loue « Dieu, Amour et Vénus ». Elle a un regret, mais c’est de n’avoir pas connu et aimé plus tôt son ami, « car c’est le plus grand regret que j’ai du bon temps que nous avons perdu ». En lui renvoyant le même messager qui porta sa première lettre, elle a ce mot charmant : « Nous le devons aimer, car c’est par lui que nos amours furent commencées. » Sa tendresse s’étend jusqu’au frère de Guillaume, qu’elle appelle « mon frère et le vôtre », et elle lui envoie un anneau d’or. Puis c’est toute la matière des vains et adorables dialogues d’amour, ces sentiments de doute, d’indignité, cette exaltation, ces
- ↑ Remarque grammaticale : l’s est encore très souvent, au rebours du français moderne, la marque du singulier.