Page:Gourmont - Une nuit au Luxembourg, 1906.djvu/40

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considéra mon compagnon avec des yeux qui me semblèrent ardents. Peut-être que, s’il avait été seul, elle eût été encore plus hardie. Une idée plus folle que les regards de la jeune femme me traversa l’esprit.

— Elle vous a regardé, dis-je, comme si elle vous connaissait.

LUI

Tout le monde me reconnaît, quand je le veux. Cette jeune femme ignore ce que suis. Elle me croit un homme tout pareil aux autres hommes, et cependant, si j’avais été seul, son regard eût été bien plus vif, car elle désire de douces paroles, elle désire des baisers. Mais quel serait son destin, si j’avais cédé à sa muette sympathie ! Les femmes que j’aime perdent toute notion raisonnable de la vie,