Page:Gozlan - Les vendanges, 1853.djvu/46

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une nièce de M. Anderson. À cinquante lieues de Paris seulement l’homme et l’enfant, par ces précautions calculées, devenaient introuvables. La confusion préméditée du père, de la mère et de leur fille, touchait à un résultat des plus énigmatiques. Auraient-ils chacun vécu séparément à mille ans d’intervalle, qu’ils n’auraient pas eu plus de peine à se rallier. Dieu seul aurait pu les réunir.

J’appris également, car le chapelain irlandais ne me faisait mystère que de certains faits de la discrétion desquels son serment répondait, que tous les employés de la maison avaient reçu leur congé depuis trois semaines.

J’allai plus souvent à l’hôtel du jour où le docteur me fit part de sa résolution de quitter Paris dans un mois. J’avais remarqué, à force d’être témoin du même incident, que le chapelain Anderson, toutes les fois que j’entrais dans l’appartement, se levait, et se dirigeait, en cherchant le plus possible à ne mettre aucune affectation dans ce mouvement, vers la porte vitrée d’un cabinet. Il la fermait et en retirait la clef. Un soir, après le dîner, lady Katty avait été, je me souviens, d’un enjouement extraordinaire. Les porcelaines en avaient souffert beaucoup ; les tapis avaient participé à un sandwich général.

— Monsieur, disait-elle au bon M. Anderson, irons-nous en Prusse ?

— Non, milady, répondait le chapelain.

— En Hollande ?

— Non, milady.

— En Russie ?

— Non, milady.

— Ah ça ! monsieur, vous qui ne mentez jamais, si,