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ROMAN D’UN PÈRE.

tu ce triste hiver à Paris, comme il venait souvent te désennuyer ?… Nous avons passé alors de bonnes soirées.

Elle devint pensive, et moi, craignant de la voir revenir aux pénibles souvenirs de ce passé douloureux, je détournai la conversation.

— C’est un pays superbe que celui-ci, dis-je, mais que mange-t-on dans ce paysage de féerie ? Il n’y a pas de boutiques, il n’y a pas même de marchands…

— Il y a toujours des poulets et du beurre, répondit Félicie qui accourait un volatile dans chaque main ; si vous voulez vous plaindre de la nourriture, monsieur, vous allez nous rendre bien malheureux !

C’était sa manière à elle de rassurer les gens inquiets. Je la laissai dire. Du reste, grâce à son activité et à sa prévoyance, nous eûmes toujours un ordinaire confortable.

Le ciel et l’Océan aux teintes changeantes, les falaises qui prenaient un air riant ou sévère suivant les heures du jour, les sentiers étroits tapissés de fleurs sauvages, où la mer apparaissait soudain par un trou dans la haie, les pentes gazonnées et les bois pleins d’ombre, faisaient de cette vie un enchantement perpétuel. Jamais