Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 1.djvu/179

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Jéhu entra sans obstacle à Jezréel. La reine mère Jézabel ne perdit rien de sa fermeté. Richement vêtue, elle se mit à la fenêtre de ses appartements et cria : Que viens-tu faire, meurtrier de ton roi, autre Zamri ? Jéhu commanda aux eunuques du palais de la précipiter sur le sol, et ils obéirent. Les chevaux passèrent sur le corps de cette reine qui avait causé tant de calamités, et son sang, rejaillissant sous leurs sabots, éclaboussa les murs de la demeure royale. Les contemporains, qui n’avaient pas oublié l’exécution de Naboth et de ses fils, durent frissonner à la vue de ce châtiment.

Mais ce n’était pas tout : si le fils et l’aïeule étaient morts, d’autres fils, neveux et parents de Joram, vivaient encore au nombre d’environ soixante-dix, à Samarie, élevés par les Anciens les plus considérés du royaume. Jéhu pria ces derniers d’en placer un sur le trône. Eux, s’apercevant que la requête n’était pas sérieuse, eurent peur d’agir par eux-mêmes et s’en remirent à l’homme qui venait de tuer deux rois. Jéhu leur lit dire alors de venir à Jezréel avec les chefs ; ils comprirent à demi-mot et arrivèrent avec les tètes des descendants d’Achab. Voilà la fidélité que ceste maison trouva dans son malheur ! Pendant la nuit, Jéhu fit placer les têtes sur deux rangs à l’entrée de la ville et, le jour venu, convoqua la population à cet endroit. Devant ces visages convulsés, il affirma n’avoir conspiré que contre Joram ; ceux-ci, dit-il, étaient tombés par d’autres mains, et la prophétie d’Élie contre la maison d’Achab s’était accomplie. Jéhu, qui alliait l’habileté à la détermination, fit ensuite exécuter comme assassins tous ces grands qui lui avaient livré les têtes ; puis, aucun descendant d’Achab ne restant, il monta sur le trône et les habitants de Jezréel lui jurèrent obéissance.

Pour se concilier le peuple, il se mit en devoir d’attaquer l’idolâtrie dans son centre même, et, suivi de ses affidés, se dirigea sur Samarie. En route, il rencontra Jonadab — c’était ce disciple d’Élie qui avait institué la règle nazaréenne dans sa famille — : Es-tu toujours le même pour moi, lui demanda Jéhu. — Certes, répondit l’autre. — Eh bien ! donne-moi la main. Et l’informant de ses intentions, il l’emmena dans son char pour le rendre témoin de son zèle. Arrivé à Samarie, Jéhu convoqua au