Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 1.djvu/24

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et d’abominable dans leur mythologie, c’est qu’ils allaient chercher bien au-dessous de l’homme ces êtres à qui ils rendaient hommage et dont ils imploraient l’assistance. Ils donnaient à leurs dieux des formes bestiales et adoraient de vils animaux comme des puissances célestes.

Voilà quel culte abject les Israélites rencontrèrent en Égypte et eurent journellement sous les yeux. Une telle aberration ne pouvait avoir que de fâcheuses conséquences. Quand l’homme voit dans la brute une divinité, il descend lui-même forcément au niveau de la brute ; aussi est-ce en brute que le peuple était traité par les rois et par les castes supérieures, celles des prêtres et des guerriers. Nul respect pour l’homme, nul souci de la liberté des indigènes, encore moins de celle des étrangers. Les pharaons se vantaient de descendre des dieux, et, comme tels, ils étaient déjà divinisés de leur vivant. Tout le pays était à eux ; à eux, la population entière. S’ils laissaient aux laboureurs un coin de terre pour le défricher, c’était pure générosité de leur part. À proprement dire, il n’y avait point de peuple en Égypte, il n’y avait que des serfs. Le roi contraignait des centaines de mille hommes à des corvées pour les constructions colossales des temples et des pyramides. Quant aux prêtres égyptiens, ils étaient dignes des rois, dignes de leurs dieux. Que les pharaons accablassent le peuple des plus durs travaux, ils n’en étaient pas moins proclamés demi-dieux par les prêtres. Sous un tel régime le peuple dut perdre tout sentiment de dignité, dut fatalement s’abrutir ; il s’accoutuma à un dégradant esclavage et ne fit jamais la moindre tentative pour secouer ce joug de fer.

La honteuse idolâtrie des Égyptiens les conduisit à des écarts plus honteux encore. La notion de chasteté leur devint absolument étrangère. Les animaux étant réputés dieux, partant supérieurs à l’homme, avoir commerce avec eux était chose ordinaire, qui n’entraînait ni punition ni déshonneur. On représentait les dieux dans les poses les plus impudiques ; les hommes étaient-ils tenus de valoir mieux que leurs divinités ?...

Rien n’est contagieux comme la sottise et le vice. Les Israélites, surtout ceux qui frayaient de plus près avec les Égyptiens, adoptèrent insensiblement les turpitudes et les dérèglements, conséquence de l’idolâtrie.