Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 1.djvu/27

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cesse exposés aux sévices des plus vils Égyptiens. Voyant un jour un de ces hommes frapper injustement un hébreu, il ne put maîtriser son indignation et il châtia le coupable. Puis il eut peur d’être découvert, s’enfuit de l’Égypte et gagna le désert. Il s’arrêta dans une oasis, aux environs de la chaîne du Sinaï, où demeurait une tribu de Madianites. Là, comme naguère en Égypte, il fut témoin d’un acte de violence, et là encore, animé d’un saint zèle, il vint eu aide à de faibles bergères. Ce service lui valut la reconnaissance du père des jeunes filles, un cheikh ou prêtre madianite, dont l’une des filles devint sa femme. Il embrassa dans ce pays la vie pastorale. Là, dans l’isolement et la solitude, entre la mer Rouge et la Palestine, tandis qu’il cherchait pour les troupeaux de son beau-père un pâturage propice, l’inspiration prophétique le saisit...

Qu’est-ce que l’inspiration prophétique ! Jusqu’à présent, ceux-là mêmes qui ont pénétré plus avant dans les mystères de l’univers et de l’âme, — ce petit monde qui embrasse le grand, — ceux-là, dis-je, en ont bien quelque soupçon, mais nulle idée claire. Le domaine de l’âme renferme des coins obscurs, qui restent impénétrables au regard du plus profond penseur. Mais on ne saurait nier que l’esprit humain, même sans le secours des organes physiques, ne puisse apercevoir de loin le mystérieux enchaînement des choses et le jeu des forces diverses. En vertu d’une faculté interne encore inconnue, les hommes ont découvert certaines vérités qui ne sont pas du ressort des sens. Cela prouve que l’âme possède certaines facultés qui dépassent le cercle des sensations et du jugement, qui ont la puissance de soulever le voile de l’avenir, de découvrir des vérités transcendantes, utiles à la conduite morale de l’homme, et même d’entrevoir quelque chose de l’Être incompréhensible qui a combiné les forces de l’univers et qui en maintient le jeu. Sans doute les âmes vulgaires, préoccupées des soins de la vie matérielle, n’ont pas cette puissance. Mais une âme exempte d’égoïsme, supérieure aux appétits et aux passions, vierge des scories de la matière, une âme uniquement absorbée dans l’idée divine et aspirant exclusivement à la perfection morale, pourquoi une telle âme n’obtiendrait-elle pas la révélation de vérités morales et religieuses ? Pendant