Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 1.djvu/65

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le succès de ses desseins. Petit à petit ils devinrent assez nombreux pour former une compagnie, une communauté lévitique. Ils étaient habiles musiciens, savaient jouer des timbales, de la harpe et du luth. La parole brûlante des prophètes, revêtue d’une forme poétique, a certainement servi de base à la mélodie musicale. Réunies, paroles et musique exerçaient une telle puissance que les auditeurs, saisis d’enthousiasme, tombaient dans l’extase et se sentaient comme transformés. Ces stagiaires de la prophétie, dirigés par Samuel et poussés par l’esprit divin, eurent une part considérable à la révolution morale qui s’opéra chez les Israélites. Une autre circonstance encore contribua à relever ce peuple de son apathie. Pendant toute la durée de la judicature, la tribu de Juda[7] n’avait pris aucune part aux affaires publiques ni aux événements. Confinée dans les pacages et les solitudes de son territoire, elle était, pour les autres tribus, comme si elle n’eût point existé. Les Jébuséens, qui occupaient la région située entre les monts d’Éphraïm et ceux de Juda, isolaient cette dernière tribu de ses sœurs du nord. Ce sont seulement les entreprises réitérées des Philistins sur le territoire israélite qui semblent avoir secoué cette tribu et l’avoir fait sortir de sa retraite. Quelles que soient d’ailleurs les circonstances qui ont amené cette situation, il est certain qu’à l’époque de Samuel la tribu de Juda et sa vassale, celle de Siméon, entrèrent dans l’action commune. Jacob et Israël, séparés l’un de l’autre pendant les longs siècles écoulés depuis leur entrée au pays, sont maintenant réunis, et c’est probablement Samuel qui a provoqué cette jonction. L’entrée de Juda sur la scène y introduit un élément nouveau, plus vigoureux, et en quelque sorte rajeunissant. Dans la province dont elle avait prit possession, la tribu de Juda avait trouvé peu de villes et une civilisation peu développée. La seule ville qui eût un nom était Hébron ; le reste n’était que bourgades pour des pâtres. Les mœurs raffinées et corrompues de la Phénicie restèrent étrangères aux Judaïtes et aux Siméonites ; le culte de Baal et d’Astarté, avec sa dépravation sensuelle et grossière, ne pénétra pas jusqu’à eux. Ils restèrent, en majeure partie, ce qu’ils avaient été à leur entrée dans le pays : de simples pasteurs, jaloux de leur liberté et sachant la défendre, mais peu ambitieux de gloire militaire. C’est dans la